Le chef du Bloc Québécois, Yves‑François Blanchet, la députée d’Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou, Sylvie Bérubé et le député d’Abitibi-Témiscamingue, Sébastien Lemire, ont réagi à l’énoncé d’intention du gouvernement libéral prétendant soutenir le français au Québec et au Canada, dont il admet la précarité. D’entrée de jeu, le Bloc Québécois souligne d’une part qu’il s’agit d’un document qui offre bien peu de substance, qui ne présente que des intentions. Il apparaît évident qu’elles ne seront pas mises en œuvre avant de probables élections, et que même si elles étaient appliquées et sans être mauvaises en soi, les mesures vaguement présentées ne ralentiront pas le recul du français ni au Québec ni au Canada.
« La ministre s’est prêtée à un exercice de relations publiques visant à faire croire aux francophones du Canada comme aux Québécoises et aux Québécois qu’un « coup de barre » allait être donné en matière de protection du français. Toutefois, je l’accueille avec enthousiasme, ce document : il permet de débattre de langue, ce que le gouvernement Trudeau évite en général », a déclaré Yves‑François Blanchet.
Ainsi, sur les principales mesures annoncées :
- En ce qui a trait à l’application de la Charte de la langue française au Québec aux institutions sous juridiction fédérale, le Bloc Québécois insiste : le fédéral n’a pas à réinventer ce qui existe déjà. Il n’a qu’à l’appliquer. Il serait en outre dommageable que l’application de telles mesures au Québec soit assujettie au rythme de leur contrepartie au Canada;
- Le Bloc Québécois accueille de façon positive l’obligation de bilinguisme pour les juges, mais il s’agit d’une mesure minimale sur laquelle le gouvernement Trudeau tergiverse depuis 2016;
- Nous savons peu de choses des mesures destinées à rendre plus bilingue la fonction publique fédérale, mais les incitatifs ne sauraient suffire, les données suggérant même que les francophones hésitent à faire autre chose que passer à l’anglais en présence d’autres fonctionnaires anglophones;
- Le bassin d’immigration francophone n’est pas suffisant pour satisfaire les attentes du Québec à cet égard, et donc pas davantage ceux de la ministre pour l’ensemble du Canada. Il y a en outre peu de raisons de croire que si les communautés francophones et acadiennes du Canada peinent à préserver leur nombre et leur poids démographique, elles parviendront à éviter l’anglicisation progressive d’une telle immigration. La solution est davantage dans l’intégration d’immigrantes et d’immigrants de toutes origines par des mesures fortes dont il reviendra aux francophones et aux Acadiens du Canada de décider. Quant au Québec, il doit avoir la seule maîtrise d’œuvre en matière linguistique et d’intégration des immigrantes et d’immigrants sur son territoire.
Dans cet esprit, le Bloc Québécois a présenté trois projets de loi importants qui vont dans le sens d’une habilitation exclusive du Québec en matière de langue et d’accueil des immigrants :
- L’application de la Charte de la langue française (loi 101) aux institutions sous juridiction fédérale;
- La nécessité de connaître minimalement le français pour faire une demande de citoyenneté à partir du Québec;
- La soustraction du Québec à l’application de la doctrine multiculturaliste canadienne.
Ce qui serait plus utile encore, ce serait que le gouvernement du Canada s’abstienne de soutenir les démarches devant les tribunaux pour affaiblir l’application de la Charte de la langue française au Québec et reconnaisse que le Québec dispose des outils et juridictions pour assurer le dynamisme du français sur son territoire.
Le gouvernement du Québec a d’ailleurs fait connaître ses demandes dans le cadre de la révision de la Loi sur les langues officielles (LLO), notamment :
- La préséance de la juridiction québécoise en matière linguistique;
- La reconnaissance que la langue française est la seule langue officielle en situation de précarité;
- Et évidemment, de concert avec un vote unanime de l’Assemblée nationale et l’appui de tous les anciens premiers ministres et de l’ancienne première ministre du Québec, l’application de la Charte de la langue française aux institutions sous juridiction fédérale au Québec.
Quoiqu’on en dise au cours de la tournée promotionnelle sur les intentions fédérales en matière linguistique, le document de la ministre Joly est un soufflet au visage du Québec. Le Québec ne jouira d’aucune reconnaissance particulière ni d’aucune juridiction exclusive en matière de langues et au mieux s’inspirera-t-on de la loi 101 pour mettre en place de possibles mesures pour inciter à la francisation dans les institutions de juridiction fédérale au Canada. Tout est refusé.
« Le document de madame Joly est la preuve que le Québec doit avoir la maîtrise d’œuvre exclusive en matière linguistique sur son territoire. Avec cet énoncé d’intention, on voit que le Québec devrait s’ajuster au rythme du Canada avec des mesures qui ne doivent pas trop heurter les provinces canadiennes. Le français est en perte au Québec et notre langue française est en péril. Nous devons la protéger puisqu’elle est l’attribut symbolique de notre identité nationale, celle de la société québécoise! », explique Sylvie Bérubé, députée d’Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou.
Sébastien Lemire, député d’Abitibi-Témiscamingue conclu ainsi : « Nous verrons le sérieux du gouvernement libéral sur sa réelle volonté de protéger la langue française lorsqu’il votera demain sur le projet de loi C-223 de ma collègue Sylvie Bérubé qui exige une connaissance suffisante du français comme condition à l’obtention de la citoyenneté canadienne pour les résidents permanents du Québec. Malheureusement, j’ai peu d’espoir que le Parti libéral vote dans le bon sens, en faveur du projet de loi. Quant au document sur les intentions fédérales en matière linguistique, je n’y vois qu’une occasion ratée d’enfin appliquer la loi 101 aux entreprises à charte fédérale, comme Air Canada et Bell Canada, sur le territoire du Québec. »